Il fut un temps où j'avais du mal à comprendre qu'on puisse être affecté par l'annonce de la mort de quelqu'un qu'on n'avait jamais rencontré, juste parce que ce quelqu'un avait, pour une raison ou une autre, compté pour vous.
Je le comprends mieux à présent.
J'envie un peu le vaillant
Imaginos de trouver en lui-même les ressources qui lui permettent de poster sur son blog, sous le label "oraisons funèbres", un bref éloge des personnes que, de leur vivant, il trouvait intéressantes; moi, la plupart du temps, le cœur me manque.
Au cours de la dernière année, il m'a manqué pour parler d'Andrea Camilleri, Luis Sepúlveda, Adamov, Nick Tosches, Little Richard, Peter Beard, Robert Frank, Olivia de Havilland, Juan Giménez, Johnny Clegg, Honor Blackman, José Mojica Marins, Isabelle Weingarten, Vaughan Oliver, Gahan Wilson, Pierre Guyotat, Mady Mesplé, Mort Drucker, Lucia Bosè, Gudrun Zapf, Nobuhiko Ōbayashi, Sarah Hegazi, Charles Gérard, Pierre Le-Tan, Carlos Ruiz Zafón, René Auberjonois, Edén Pastora, Hideo Azuma, Kim Shattuck, Claude Evrard, Mike Resnick, Christopher Tolkien, Idir, McCoy Tyner, Joan-Pau Verdier, Graeme Allwright, Sarah Maldoror, Claudine Auger, Tome, Mory Kanté, Jessye Norman, ils laissent tous un trou derrière eux: qu'est-ce qu'on mettra dedans? Et René Sussan, Ivan Král, Petr Král, Marcel Maréchal, Kirk Douglas, Mirella Freni, Maurice Rajsfus, Michel Piccoli, Charles Portis, René Follet, Genesis P-Orridge, George Steiner, Pertuzé, Jean-Loup Dabadie, tous ces gens dont, ces derniers mois, la disparition m'a attristé, à des degrés divers (parfois, soyons honnêtes, juste un petit peu; souvent, plus que je n'aurais pu l'imaginer, si j'y avais pensé, avant).
J'aurais du mal à écrire leurs noms dans une phrase qui se terminerait par "sont morts".
Et chercher des périphrases n'arrangerait rien.
D'eux tous, on pourrait dire ce que j'ai dit de
Bretécher: ce qu'ils faisaient, ils le faisaient bien.
Mais
Linda Manz, tout de même!
Linda Manz, c'est différent.
Linda Manz, c'était un morceau de moi.