lundi 31 mars 2014

La boite de craies de couleurs qui ne nous quitte jamais


Ahora pasa que las tortugas 
son grandes admiradoras
de la velocidad, como es natural.
Las esperanzas lo saben, y no se preocupan.
Los famas lo saben, y se burlan.

Il faut vous dire que les tortues 
sont grandes admiratrices de la vitesse 
et c’est bien naturel.
Les Espérances le savent, et s’en fichent.
Les Fameux le savent, et se marrent.



Los cronopios lo saben, y cada vez 
que encuentran una tortuga,
sacan la caja de tizas de colores
y sobre la redonda pizarra de la tortuga
dibujan una golondrina.

Les Cronopes le savent, et chaque fois 
qu’ils rencontrent une tortue, 
ils sortent leur boite de craies  de couleur et, 
sur le tableau rond de son dos, 
ils dessinent une hirondelle.

Julio Cortazar, Cronopes et Fameux 
(Historias de Cronopios y de Famas, Minotauro, Buenos Aires, 1962) 
traduit par Laure Guille-Bataillon, Gallimard, 1977



Illustration:  une capture d'écran 
qui traîne un peu partout sur le net.
Si c'est vous sur la photo, prenez contact avec moi, 
je vous dessinerai une hirondelle sur le dos.

jeudi 27 mars 2014

Cortazar, encore


Ainsi donc, chers lecteurs, la fatalité a fait que vous n'avez pas pu visiter l'exposition que le dernier Salon du Livre, à la Porte de Versailles, consacrait à Julio Cortazar
Faites comme Tororo: consolez-vous en rendant visite au blog de Chris Kearin, Dreamers Rise,  qui fourmille d'informations intéressantes sur la vie de Cortazar, sur la disponibilité de ses œuvres en langue anglaise et sur leur réception en Amérique du Nord, sur l'état de la publication en Argentine de sa correspondance et de ses inédits, ou à propos des biographies et des études sur l'auteur de Marelle. Chris Kearin a bien voulu me permettre de reposter ici  la présentation qu'il a faite du livre de Jesús MarchamaloCortázar y los libros.

  Neuf ans après la disparition de Julio Cortázar à Paris en 1984, les quelque quatre mille volumes de sa bibliothèque ont été acquis, par l’entremise de sa première femme et exécutrice littéraire, Aurora Bernárdez, par la Fondation Juan March à Madrid. 
Cortázar y los libros, un mince mais savoureux opuscule publié par Fórcola Ediciones, généreusement illustré (en noir et blanc), nous invite à une visite privée de la bibliothèque de Cortázar avec pour guide un journaliste et écrivain espagnol, Jesús Marchamalo.



Cortázar était un avide lecteur, versé dans au moins trois langues, et de ce fait sa bibliothèque comprend un vaste choix de titres aussi bien en français et en anglais qu’en espagnol. Il pouvait avoir la main lourde en matière d’annotations - il était de ceux dont Anne Fadiman dit que leur amour des livres est plus «charnel» que «courtois» - et n’avait pas scrupule à surcharger les livres qu’il lisait de notes en marge, de soulignements, d’objections, d’approbations, et de toutes sortes de gribouillis dont la signification (lorsqu’ils en avaient une) demeure énigmatique.
Beaucoup de volumes portent des envois autographes d’amis écrivains, Octavio Paz, Carlos Fuentes, Pablo Neruda, Elena Poniatowska, José Lezama Lima, Rafael Alberti (dont la dédicace est agrémentée d’un dessin qui prend toute la page), et la poétesse Alejandra Pizarnik (une amie de toute une vie, de qui on devine, avec malaise, l’aggravation des problèmes mentaux à travers la dégradation progressive de son écriture). 
Il se pourrait bien que nombre de volumes aient été empruntés à des confrères et jamais rendus, par exemple un recueil de poèmes de Luis Cernuda à l’intérieur duquel est inscrit le nom de Mario Vargas Llosa, ou une anthologie de la poésie catalane portant une dédicace manuscrite à Gabriel García Márquez et à sa femme Mercedes.
Certaines dédicaces proviennent tout droit des royaumes de l’impossible, des archipels de la fiction, telle celle de Thomas de Quincey qui du fond de sa tombe salue en Cortázar « un ami de Mr Keats, je crois? »… 
Il y a aussi quelques mystères: qui, par exemple (Cortázar lui-même, une de ses compagnes ou de ses amies, ou la première propriétaire?) a pressé entre les pages d’un exemplaire des Fleurs du mal de Baudelaire tant de fleurs séchées?


Quand il ne traduisait pas Yourcenar en espagnol
et ne lisait pas Lewis Carroll en français,
Cortázar s’intéressait à l’humour breton,
comme en témoignent les craquelures sur le dos de
la célèbre anthologie due à André Noir.

Le livre porte témoignage de l’évolution des préférences littéraires de Cortázar à travers les phases successives de son existence, depuis les années 1930. On note de curieux manques, qui ne sont d’ailleurs nullement inexplicables; de la seule absence de tel ou tel livre dans la succession d’un écrivain qui, dans sa vie, voyagea beaucoup et déménagea souvent, on ne peut conclure qu’il ne l’a jamais possédé et encore moins jamais lu.
Ainsi, pas de Camus, pas de Beauvoir, de Duras, de Tolstoï ou de Tourguénieff, et étonnamment peu de Vargas Llosa* (un excellent ami, en dépit de leurs divergences politiques) ou de García Márquez (notamment, pas de Cien años de soledad). 

Le livre de Marchamalo (pas encore traduit, ni en anglais, ni en français)   ne prétend pas à la rigueur d’une étude universitaire (on peut espérer que d’autres s’attaqueront un jour à cette tâche) et laisse sans réponse, à propos des lectures de Cortázar, non moins de questions qu’il n’en élucide. 

Mais à toute personne intéressée par la personnalité de Cortázar et par son œuvre, ou par les interactions entre un écrivain et sa bibliothèque personnelle - la façon dont il la construit, la façon dont elle le forme - il promet un plaisir sans mélange.

Chris Kearin, 2011 
(traduit, avec permission, par Tororo)

* La visite virtuelle de cette bibliothèque, proposée par le site du Centro Virtual Cervantes, permet de relativiser l'étonnement exprimé par Marchamalo, et dont ce compte-rendu se fait seulement l'écho: plusieurs ouvrages de Vargas Llosa y figurent; sans doute Marchamalo n'avait-il pas eu  accès à la totalité du fonds, ou celui-ci n'était-il pas encore entièrement catalogué, à l'époque (2010) de la rédaction du livre. (NDTT)


Pour illustrations, la première et la quatrième de couverture 
de l'essai de Jesus Marchamalo (© Fórcola Ediciones): 
il n'y manque que l'odeur du papier.

samedi 15 mars 2014

Dansez trêve, dansez catale, et, si vous pouvez, dansez espère


2014 a été décrétée année Cortazar 
par les instances compétentes.

Pour toute la durée de l’année Cortazar, 
les Cronopes ont disposé des réceptacles destinés à recevoir des contributions au financement des festivités sur des rebords de fenêtres, des planches en saillie sur des barrières de chantiers, des tablettes de cabines téléphoniques (là où il y en a encore) et différents autres emplacements raisonnablement abrités de la pluie (de préférence, mais pas toujours car on ne saurait penser à tout). 
Ce sont des tasses à thé en porcelaine, des vide-poches en régule hérités de grands-parents, des moques publicitaires aux couleurs de différents pourvoyeurs de restauration rapide, des verres à dent en plastique, des cendriers récemment réformés par les bistros qui les employaient naguère et des soucoupes en aluminium; vous les reconnaîtrez facilement malgré leur disparate, 
car les Cronopes, prévoyants, ont estimé que ce serait dommage qu’ils ne servent à rien du tout tant que vous ne les aurez pas entièrement remplis de monnaie - ce qui, ils en sont conscients, peut vous demander un certain temps - et ils en ont pour l’instant garni le fond de graines destinées aux oiseaux. 
Repérez ceux qui se trouvent dans votre quartier, et attendez pour y déposer votre obole  que les oiseaux aient mangé toutes les graines: ce serait dommage que vos billets rendus moelleux par une longue circulation soient détournés de leur usage fiduciaire pour rembourrer des nids d’hirondelles, et que vos pièces brillantes finissent comme décoration dans les demeures des pies.

Pendant la même période, 
les Fameux ont annoncé par les voies officielles 
qu’en l’honneur de Julio Cortazar
 ils danseront trêve les jours pairs de 16 heures 30 à 17 heures, 
et qu’ils danseront catale les jours impairs 
de 17 heures à 17 heures 30.


Vert et humide, un Cronope s’est posé sur une dalle...


... sur laquelle quelqu’un a gravé: « Julio Cortazar »,
quelque part dans le cimetière du Montparnasse.

Une fois là, ne sachant plus très bien quoi faire,
il sourit d’un air un peu embarrassé.

Post-scriptum du 23 mars: Lecteurs anglophones, si vous avez du mal à déchiffrer le cronope, une version anglaise de ce billet vous attend sur Dreamers rise. Merci au scrupuleux traducteur, Chris Kearin, et bonnes salènes! 



Si vous vous demandez d'où sortent 
les Fameux et les Cronopes: de .

Les photos illustrant ce billet sont: 
la première de Pedro Cambra, 
les deux autres de Anonymous Photographer (Wikimédia), 
toutes deux sous licence Creative Commons.
Le Cronope de pierre est l'œuvre de Julio Silva.

samedi 8 mars 2014

Du nom du père (Proleterka, de Fleur Jaeggy)


Je cherche l’enfant mort. Il n’y est pas. 
La seule personne que je voudrais voir, manque. 
Fleur JaeggyProleterka 



Je ferme les rideaux près de notre table. La lumière dérange Johannes. Et moi aussi. Nous avons peut-être la même maladie. Mes yeux aussi deviendront sans couleur. Nous n’avons pas les yeux forts comme sa femme, ma mère. Comme les femmes des générations qui l’ont précédée. Elles avaient toutes des yeux foncés. Même quand ils étaient bleus ou verts.
Je ne fais que regarder. Ce que je ne sais pas, c’est où regarde Johannes. Je ne réussis pas à comprendre d’où il vient. D’une fabrique abandonnée? D’une chambre d’hôtel? Et pourtant, mon père et moi, nous sommes unis par un lien comme par une volonté supérieure, qui n’appartient pas à cette terre. Quand j’étais petite, je lui disais; « Sind Sie mein Vater? » êtes-vous mon père? «  Herr Johannes, ich bin Ihre Tochter », je suis votre fille. Légalement, je lui appartenais. J’étais sa compagne des quatorze jours. Sa compagne de quelques jours d’hiver, de quelques jours d’été. Et à présent, exceptionnellement, en dehors des règles, au printemps.

Ces quelques lignes appartiennent-elles au roman de Fleur Jaeggy, Les années bienheureuses du châtiment
Ha, vous vous y êtes laissé prendre. 
Vous aviez l’impression de les connaître déjà, cette collégienne silencieuse et son père encore plus silencieux, l’homme aux yeux pâles et au complet gris: vous vous souveniez de ce billet de l'été dernier. Non, c’est dans Proleterka, le quatrième roman de l’écrivain suisse de langue italienne (Les années bienheureuses du châtiment, son premier roman traduit en français, était le troisième), que nous montons avec eux, par un printemps vénitien, sur un navire de croisière yougoslave au nom chargé de matérialisme historique - un prolétaire n’a pas de patrie (Vaterland): il n’a à perdre que ses chaînes - et à la cheminée frappée d’une étoile rouge.
Nous avions noté que le père de la pensionnaire des années bienheureuses… était la figure masculine qui occupait le plus de place dans le livre: c’est aussi le cas dans Proleterka, même si un chapitre évoque aussi la rencontre de la narratrice avec son premier amant: en général, dans les romans sur l'adolescence, c'est le morceau de bravoure! Mais, quelle ironie, ici cet amant n’est qu’une silhouette, presque une caricature. 
La protagoniste de Proleterka, comme celle de Les années bienheureuses du châtiment, ne se présente pas. Mais son père, cette fois, elle lui donne un nom: Johannes H
 C’est la Corporation (Zunft) à laquelle appartient Monsieur H. qui a organisé cette croisière privée, pour aller en Méditerranée visiter des ruines. Voilà pourquoi tant de Suisses d’âge mûr, parmi lesquels on remarque ce couple mal assorti, le monsieur de soixante-dix ans et la jeune fille de seize ans, embarquent sous ce pavillon rouge. 
Dans les valises de la jeune fille: Herman Melville et Jack London; et ce n’est que dans ses souvenirs littéraires qu’on sentira souffler l’air du large.  

Je voudrais vous parler de Billy Budd au lieu de vous raconter cette courte histoire; hissée sur une vergue qui oscille sous un vent contraire livré au néant. Billy Budd, je vois son image tandis que court le paysage, tandis que passent les heures en compagnie de Johannes. 
On ne savait pas où était né Billy Budd, 
ni qui était son père. 
On l’a trouvé dans un joli panier doublé de soie. 
Je connais Billy Budd bien plus que mon père. 

Ce que la fille de Johannes sait de Johannes, elle l’a « lu dans un album qu’on a l’habitude d’offrir quand un enfant naît. Les premières années de vie, les premiers  mois y sont enregistrés presque jour par jour. Au dix-huitième mois, Johannes note que sa fille est allé le voir à l’hôpital. Si elle veut quelques informations sur son existence au cours de ses premières années, elle n’a qu’à feuilleter l’album. C’est une preuve. C’est la confirmation d’une existence. De façon laconique, Johannes signalait ce que faisait sa fille, où on l’avait amenée, son état de santé.
Des phrases courtes, sans commentaire .»

D’autres choses reçoivent un nom dans Proleterka, des maladies par exemple: infarctus, carcinome, qui n’étaient qu’évoquées obliquement dans Les années…  Le père de «l’élève X»  refusait le soleil de l’été, on  ne nous disait pas pourquoi; la fille de Johannes nous apprend, de son père, qu’il a eu un frère jumeau, qu’elle n’a connu que presque aveugle et cloué dans un fauteuil roulant.
Nous avons peut-être la même maladie.  Mes yeux aussi deviendront sans couleur. Nous n’avons pas les yeux forts… 
Mais il est d’autres choses encore qui ne seront pas nommées. Les mots peuvent être si trompeurs.

La langue, dans  Les années bienheureuses du châtiment, était déjà remarquable par sa concision. Dans Proleterka, encore plus.
Proleterka est écrit en phrases courtes, avec peu de commentaires, comme l’album de naissance légué par Johannes.
Comme si les années avaient appris à Fleur Jaeggy à se méfier encore davantage des mots.
On nous dit qu’au commencement était le Verbe? Moi j’ai appris qu’au commencement était le mensonge, nous dit Fleur Jaeggy. Elle nous le dit entre les lignes. Comment user de toujours moins de mots? Ce seront souvent des demi-phrases, des propositions dépouillées de privées de orphelines de verbe.

La langue maternelle de Fleur est l’italien, pourtant la langue allemande paternelle ne lui est pas moins familière; comme c’est étrange, elle en fait la remarque à mainte reprise dans le roman, «en allemand, cela sonne différemment, comme plus réel».
«Ma voix change d’intonation. 
Je m’aperçois que je parle allemand. 
Comme si cette langue m’était imposée». 
Et dans le roman sont cités beaucoup de mots, de phrases (courtes) en allemand, suivis de leur traduction, pour souligner l’étrangeté, la distance.

La mère et le père, Johannes et sa femme, n’ont jamais parlé la même langue, ni au propre ni surtout au figuré, nous finissons par le comprendre.
« Ma mère n’a jamais eu besoin de se confesser, ni à moi, ni à mon père Johannes, ni à d’autres. […] Elle n’a pas eu d’amour pour la vérité, « Wahrheitsliebe », ma mère. En allemand, c’est un mot composé. Le pasteur aussi, dans l’homélie de l’adieu, avait utilisé quelques mots composés. Par exemple: Leidtragende
« celle qui porte la douleur ». C’est ainsi qu’il s’est adressé à la fille de Johannes. […] J’ai préparé un minuscule dictionnaire des mots allemands qui ont changé un destin. Qui ont changé le cours d’une vie. Par son caprice, le destin a laissé prononcer et répéter le mot amour, amour de la vérité, jusqu’à l’extinction du mot et de sa signification.»  

Le temps passe et on découvre des secrets, on les découvre quand ils ne peuvent plus rien changer, quand ils ne servent plus à rien. Des couches superposées de secrets de famille, de papiers de famille.
Des papiers à plat dans des tiroirs, séparés par des sous-main de cuir.
La fille de Johannes a-t-elle eu une grande sœur mort-née, qui aurait porté le même nom qu’elle? Peut-être, ou peut-être pas: c’était peut-être une méprise du pasteur à qui un jour on a demandé un certificat de baptême. Peut-être le sentiment qui a toujours habité la fille de Johannes, que quelqu’un d’autre essayait d’exister à travers elle, vient-il d’ailleurs. On ne peut jamais être sûr. Il faut compter avec tant d’éléments irrationnels, incontrôlables, la distraction d’un pasteur qui a pu se tromper en consultant un registre, les langues qui essaient de dire la même chose avec des mots différents, la maladie, la passion idolâtre pour la vérité qui peut frapper comme une maladie, sans souci de faire mal.
Au commencement était le Verbe? Moi j’ai appris qu’au commencement était le mensonge, nous dit Fleur Jaeggy. En allemand, le verbe est à la fin des phrases. Alors c’est à la fin du livre que la romancière place ce que dans la langue de la Création on appelle le Verbe et qu’on met au commencement, le Fiat, l’acte générateur. 
Qu’elle expose le mensonge.


C’est la fin du voyage. 
Sur le programme, il y a écrit: « Auflösung ». 
Cela signifie aussi: dissolution.


Toutes les citations (en vert) sont tirées de Proleterka.
(Proleterka, Adelphi, 2001) 
traduit de l'italien par Jean-Paul Manganaro 
(Gallimard, 2003) (ISBN 2-07-076704-3)

mercredi 5 mars 2014

Durée déterminée à l’estime



Dès le début de notre conversation, il avait fallu tirer au clair toute une série de petits malentendus: chacun de nous avait fait une mauvaise estimation de la durée du séjour de l’autre; lui croyait que j’étais là pour la semaine, peut-être même pour toute la saison, aussi il m’avait demandé tout de go si je pourrais me charger pour lui de telle et telle commission quand il ne serait plus là: il n’avait pas saisi que je ne m’étais déplacé que pour le rencontrer, croyant, quant à moi, qu’il n’était venu que pour une journée, alors que c’était plus compliqué que ça: il était arrivé la veille, devait s’absenter le lendemain et revenir plus tard…
Pour lui faire mesurer son erreur, je lui expliquai patiemment que, de la fenêtre de ma chambre, on pouvait voir le clocher du village: je m’attendais à ce qu’il en tire la conclusion évidente: ce n’était donc pas ma chambre habituelle, mais une chambre qu’on ne m’avait donnée que parce que l’autre, la «mienne», n’était pas libre, parce que je n’avais pas prévenu de mon arrivée décidée au dernier moment; et que je m’en étais accommodé pour cette fois parce que ce n’était que pour une nuit, c’était pourtant clair?
J’espérais qu’il allait en accepter les conséquences sans que j’aie à insister davantage, c’est toujours un peu embarrassant de devoir mettre les points sur les I comme ça à l’occasion de retrouvailles avec un vieil ami.
Surtout dans les rêves, où les I et les points ne sont pas toujours là où on s’attend à les trouver.

lundi 3 mars 2014

Nous n'avons encore rien vu


Tant qu'il nous reste


des choses


encore


à voir.


Alain Resnais
3 juin 1922 - 1er mars 2014

Les images de Marienbad proviennent du site filmcaptures.