Tous ces gens qui ne s'étaient jamais rencontrés jusqu'à présent, peut-être auront-ils désormais des occasions de discuter entre eux des sujets qui les touchaient de près: Jean-Louis Pesch et Aline Kominsky de bande dessinée, Helmut Berger et Martin Amis de stratégies pour ne pas sourire quand on est pris en photo, Tina Turner et Jean-Louis Murat de chansons? Ou alors: Aline Kominsky fera rire Tina Turner, Martin Amis fera sourire Helmut Berger et Jean-Louis Murat donnera des idées de BD à Jean-Louis Pesch?
La seule chose qui est sûre, c'est que personne ne sait de quoi demain sera fait.
mardi 30 mai 2023
Mai s'en va, nous on reste (pour le moment)
jeudi 25 mai 2023
Pons Pons Pons Pons
Souriez!
Vous pourrez voir tout l'été une rétrospective de l'œuvre de Louis Pons au musée Cantini.
L'exposition s'appelle "J'aurai la peau des choses" (c'est du Louis Pons tout craché).
Les samedis, vous pourrez même dessiner sur les murs.
Enfin, sur un mur.
Un mur spécial.
Il faudra s'inscrire avant.
Musée Cantini, 19 rue Grignan 13006 Marseille
Du 24 mars 2023 au 03 septembre 2023
Tél. : 04 13 94 83 30
Mail : musee-cantini@marseille.fr
Tarifs d’entrée : plein 6 €/réduit 3 €
Du mardi au dimanche de 9h à 18h
Fermeture hebdomadaire le lundi,
sauf les lundis de Pâques et de
Pentecôte (profitez-en!).
Dessin © Louis Pons & Fata Morgana
mardi 23 mai 2023
Nimona: un phénix qui a eu chaud
Netflix isn’t the hero we needed, but the hero we deserve.
(un fan de Nimona sur internet)
Vous qui commenciez à désespérer de voir un jour Nimona passer de la page à l'écran, la nouvelle vient de tomber: l'animation est bouclée!
Récapitulons:
2012 naissance de Nimona le webcomic;
2014 conclusion de la série sur le web (saluée, en son temps, ici)
2015 Nimona est publiée, sous la forme d'un bel album relié, chez Harper Collins! Plus tard Dargaud en publiera une version française aussi soignée, qui sera suivie d'une édition brochée petit format.
2019 on annonce pour bientôt une adaptation animée! ce devait être une collaboration entre WebToons et le studio Henson. Ce choix, ainsi que celui de Patrick Osborne comme réalisateur, me semblait de bon augure. On estime alors que le film pourrait sortir en 2020...
2020 Patrick Osborne et le studio Henson ont passé la main à Nick Bruno et Troy Quane de Blue Sky Studio, et le projet avance bien, mais le covid 19 passe par là, et le confinement ralentit tout...
2022 le film est, annonce-t-on, terminé à 75%, quand Blue Sky qui produisait le film est racheté par l'oncle Picsou. On connaît les habitudes du vieux grigou: une fois propriétaire de Blue Sky, il décide que l'entreprise ne vaut pas la peine d'être conservée, et les projets qu'elle développait non plus...
Oui mais, aussi entre-temps, la carrière de Stevenson a pris un autre tour: le reboot de l'antique série Masters of the Universe (un truc du vingtième siècle; ça vous rappelle quelque chose?) connaît, sous le nom de She-Ra and the Princesses of Power, un succès inattendu, et "Indy" Stevenson , scénariste et producteur exécutif de cette nouvelle série, est devenu quelqu'un de "bankable". Ça, ça plait aux financiers. Voilà la production de Nimona qui reprend, cette fois, sous le label Annapurna et, teaser à l'appui, le lancement est annoncé pour...
2023!
Seulement sur Netflix.
Ma réaction à toutes ces nouvelles est mitigée. Netflix est capable du meilleur comme du pire, n'est-ce pas? Et quand c'est le pire, c'est pas le meilleur du pire. L'équipe d'animation a connu plusieurs changements, au vu du premier teaser le style graphique est très différent de celui du comic, Stevenson, bien que toujours co-producteur exécutif, ne semble pas avoir eu la maîtrise totale du script... gardons tout de même espoir; n'avais-je pas conclu mon dernier billet sur le sujet par un optimiste "Nimona s'en sort toujours"?
dimanche 21 mai 2023
Flash
Le projet "Flash Forest" dont je vous parlais il y a quelques années, quand ils avaient lancé une souscription qui a récolté 108 713 dollars (canadiens) - ça leur a permis, estiment-ils, de bien démarrer - ont, depuis, réussi à obtenir des subventions substantielles, aussi bien du gouvernement canadien que de diverses ONG.
Ils espèrent atteindre, fin 2028 ou peut-être en 2030, le milliard de graines plantées (si les petits cochons ne les mangent pas).
Voyons quel impact peut avoir cette nouvelle sur notre capacité à produire des haikus réguliers?
Après les semailles
Les drones se sont tus
Printemps silencieux
....
Un peu sinistre tout de même. Bon. Ce n'est qu'un premier essai; pour les prochains, je vais essayer d'être plus badin; l'optimisme n'est pas interdit, dans les haikus, non?
jeudi 18 mai 2023
Quia impossibile est
De tant de choses écrites, bien peu sont vérifiables.
Pomponius Flatus, philosophe
Hé bien oui: en lisant ce livre j'ai ri comme rit la baleine qui vient d'être miraculeusement débarrassée du Jonas qu'elle avait en travers de la gorge.
D'Eduardo Mendoza, vous connaissez sûrement Le Mystère de la crypte ensorcelée, ou La Ville des prodiges: de gros romans presque sérieux (encore que résolument bizarres).
Les aventures miraculeuses de Pomponius Flatus n'est ni gros ni sérieux, mais c'est aussi un roman agrémenté de mystères et de prodiges (et dont la bizarrerie n'est pas totalement absente).
Si j'étais prié de rédiger pour ce livre une "quatrième de couverture" dans le style bien codifié de ce genre littéraire, je ne manquerais pas d'évoquer La caverne des Idées de José Carlos Somoza, les nouvelles de Borges L'Immortel ou La quête d'Averroës, peut-être irai-je même jusqu'à des comparaisons extrêmes avec les Mémoires d'Hadrien (à une extrémité du spectre) ou La vie de Brian (à l'autre bout). Et sous la couverture, qu'y a-t-il?
De l'important corpus des recherches scientifiques du naturaliste Pomponius Flatus, ne nous sont parvenus que des fragments épars, dont le plus complet retrouvé à ce jour est une longue missive adressée à son ami Fabius, relatant les incidents les plus saillants d'un voyage que Pomponius entama sous le consulat de Lucius Paulus et Caius Marcellus*. Ce document, s'il nous confirme que - comme il appert d'autres fragments de moindre étendue - Pomponius visita le Pont-Euxin, la Cilicie, la Syrie, la Palestine, le pays des Nabatéens, celui des Chérusques Vandales, et poussa peut-être jusqu'aux confins des Frisons, des Trévires et des Médiomatrices, nous apprend peu de choses sur les découvertes que l'infatigable voyageur put faire dans le domaine des sciences naturelles (tester différentes plantes et eaux curatives, c'était pourtant la raison de son voyage): tout juste y est-il fait mention des vertus soporifiques, que l'auteur dit avoir eu l'occasion d'expérimenter sur lui-même, d'une plante connue au Levant sous le nom d'halicacabon**: une déception, donc, pour les curieux de pharmacopée antique.
En revanche, ce texte jette une lumière inédite sur un domaine que ni Pline, ni Lucrèce, ni Dioscoride n'ont exploré: rien autre que les débuts de la police scientifique. Certains passages suggèrent même que Pomponius pourrait avoir été sinon le premier, du moins un des premiers (l'antériorité pouvant être revendiquée par un contemporain de l'école péripatéticienne: Héraclès Pontor) de ceux qu'on appellera plus tard - à l'initiative du plus fameux d'entre eux, Sherlock Holmes - les "détectives conseils".
Bon, OK, je ne vais pas vous promener plus longtemps: Les aventures miraculeuses de Pomponius Flatus est un roman policier bien troussé, genre polar historico-humoristique, sous-genre gros délire farcesque, carnavalesque même, truffé de références, de citations érudites (certaines sont rigoureusement authentiques, d'autres le sont beaucoup moins) et de toutes les sortes imaginables de facéties méta-textuelles, et assaisonné d'un humour pas exactement timide. Le genre d'humour qui fait pleurer le petit Jésus (de rire, hein, entendons-nous bien: pleurer de rire). À sa lecture, j'ai mêlé mes larmes de rire à celles dudit petit Jésus (car, je ne vous l'ai pas encore dit? le petit Jésus est un des personnages du livre, et, à plusieurs reprises, Pomponius réussit à le dérider - alors que cétait un garçon plutôt sérieux, en ce temps-là tout le monde à Nazareth aurait pu vous le dire si vous l'aviez demandé). Ce petit Jésus occupe d'ailleurs dans le roman une position capitale: c'est celle du client qui vient trouver le détective pour lui proposer une affaire. Comme nous sommes au premier siècle de notre ère, aucun des deux ne porte d'imperméable ni de chapeau mou, mais à part ça la situation de départ est on ne peut plus classique. Classiques aussi, la réticence initiale du détective, l'insistance du client, les tentatives des autorités pour dissuader l'amateur de marcher sur les brisées des professionnels... moins classiques, les méthodes d'investigation du détective: il puise dans les souvenirs de ses lectures, qu'il prend grand plaisir à citer (je vous ai prévenus: de ces citations, certaines sont facilement authentifiables, d'autres le sont beaucoup moins).
Il est urgent de découvrir qui a tué le riche Épulon, comment et pourquoi: le sort d'un charpentier en dépend!
Ainsi, il ne fait pas de doute que la mort est due à l'intervention d'un tiers, et point n'est besoin non plus de faire preuve d'une grande intelligence pour reconstituer ce qui s'est passé. Quelqu'un a surpris Épulon dans sa bibliothèque et lui a donné la mort, après quoi il est parti en prenant soin de fermer la fenêtre et la porte. Je suppose qu'on n'a pas trouvé la clef à l'intérieur de la bibliothèque, car, s'il en était ainsi, nous serions devant un cas étrange, mais pas tout à fait inconnu. Cicéron en mentionne un similaire, qu'il intitule Occisus in bibliotheca cum porta conclusa. Une énigme en apparence insoluble.
Remercions au passage Pomponius de nous éclairer sur l'origine de l'expression "meurtre en chambre close": quelle chance que Pomponius connaisse à fond l'œuvre de l'Orateur Romain! Mais revenons à l'enquête: à qui profite le crime? Au premier abord, lorsque disparaît un homme riche, libidineux, modérément scrupuleux quant aux moyens d'accroître sa fortune, pourvu d'une épouse qui ne s'en laisse pas conter et d'une descendance turbulente, on croit pouvoir passer en revue la liste des mobiles possibles sans avoir à sortir des sentiers battus... mais si les autorités choisissent de sauter cette étape, se satisfaisant de désigner comme suspect numéro un un quidam dont la culpabilité arrangerait tout le monde, et si le présumé innocent se dérobe devant toutes les questions qu'on lui pose, que va faire notre détective? Reprendre toute l'affaire à zéro, alors qu'il préfèrerait nettement s'occuper de ses problèmes de santé? Un des obstacles qu'il rencontre (autre artifice inséparable du roman à énigme): les réticences des témoins qu'il interroge à lui dire tout ce qu'ils savent; ils ont même tendance, tous: Grecs comme Romains, Galiléens comme Samaritains, au lieu de lui répondre sans détour, à le noyer sous un flot de références littéraires (il aurait mauvaise grâce à s'en plaindre, car lui-même s'en prive pas):
- Alors tu dois avoir connaissance du triste événement qui a conduit Épulon à traverser le fleuve des Pleurs, pour gagner le séjour d'où nul n'est revenu.
- Sauf Orphée, rectifia Philippe.
- Naturellement.
- Et aussi Ulysse, l'artificieux héros qui, dans sa longue errance, a visité le lieu où demeurent les morts. Et Alceste, qu'Héraclès alla chercher au royaume d'Hadès.
- C'est vrai, dus-je admettre, toute règle a ses exceptions.
Des exceptions aux règles, Pomponius sera bien forcé d'en recenser plus d'une, dans cette enquête où il devra bien souvent suspendre son incrédulité, devant des circonstances qui lui sembleront parfois s'affranchir des lois de la nature! Mais, si Pomponius se présente avant tout comme philosophe, il ne se réclame d'aucune école, même celle du sceptique Pyrrhon, et rappelle à l'occasion qu'Héraclite blâme notre acharnement à vouloir que la réalité se conforme à nos attentes. Les attentes du lecteur, elles, seront satisfaites: Mendoza, à la fin du roman, rattache tous les bouts de ficelle qu'il a ramassés ici et là (et il en fait l'inventaire dans une postface). Quant à son détective, toujours philosophe (ou, dans ce cas précis, physiologiste), au lieu de de se vanter d'avoir résolu une énigme sans pareille, il conclura modestement:
Je me souviens parfois des événements dont je fus le témoin en Galilée, et je me demande s'ils ont vraiment eu lieu, ou s'ils ont été le fruit d'une imagination morbide due à ma maladie.
Durant ce survol du roman d'Eduardo Mendoza, je vous ai épargné le détail des affections physiques dont est affligé Pomponius Flatus; le narrateur, lui, ne les omet pas, non sans quelque raison d'ailleurs, car certaines d'entre elles ont un rôle à jouer (en particulier par leurs manifestations sonores) dans l'histoire, faisant pencher la balance du destin, tantôt en défaveur, tantôt en faveur du héros. Voilà, je vous ai prévenus: si vous en ressentez le besoin, vous pourrez vous boucher le nez.
Il n'est point de secret enfoui si profond qu'il ne doive apparaître en pleine lumière quand viendra le temps des Révélations.
*Ah, vous vous demandez, lecteur contemporain, à quelle période de l'Ère Moderne correspond précisément ce consulat? Vous pensez que cela pourrait faire avancer un peu la résolution d'une autre énigme, historique celle-là (celle, justement, de l'année du début de cette même Ère Moderne)? Pas de chance, c'est en vain qu'on cherche les noms de Lucius Paulus et Caius Marcellus dans la liste des fastes consulaires du siècle huitième après la fondation de Rome. Peut-être, dans sa hâte à rassurer son ami Fabius sur l'état de sa santé, Pomponius s'est-t-il laissé aller à un lapsus calami?
**Dans les langues aux sonorités barbares des peuplades d'extrême-occident, l'halicacabon est appelé alkékenge. Quelques décennies après l'aventure de Pomponius Flatus, Pline l'Ancien mettra en garde les lecteurs de son Histoire Naturelle contre l'usage irréfléchi des vertus narcotiques de ce gracieux végétal, qui peut, dit-il, "provoquer le délire". Et alors? Apprenons des aventures de Pomponius à ne pas sauter aux conclusions.
(El asombroso viaje de Pomponio Flato, Seix Barral, 2008),
traduit par François Maspero, Paris, Éditions du Seuil, 2009 ;
réédition, Paris, Seuil, Points no 2405, 2010
dimanche 14 mai 2023
Demain le temps sera plus vieux
Nous avons commencé par en discuter, mon père et moi, et nous sommes très vite tombés d'accord: oui, c'était dommage de n'avoir jamais visité la côte languedocienne, alors que la Côte d'Azur, la riviéra, la côte ligure, nous les connaissons comme nos poches, n'est-ce pas papa? Et nous décidons que nous allons y passer quelques jours. En chemin vers la gare (entre-temps, il s'est encore passé deux ou trois choses dont le souvenir s'est plus ou moins effacé) je remarque, dans le caniveau, plusieurs livres qui viennent apparemment d'y être jetés; l'explication est simple, c'est la fin de l'année scolaire, et les écoliers bruyants que nous venons de croiser (une de ces choses dont le souvenir est devenu flou) étaient d'humeur à se débarrasser des livres d'un programme qu'ils sont à présent pressés d'oublier ("les cahiers au feu, le maître au milieu", disait-on de mon temps; sans doute dans les cartables des enfants d'aujourd'hui n'y a-t-il plus d'allumettes). D'ailleurs, indice qui ne trompe pas, tous ces livres sont recouverts de chemises de papier gris (ça aussi, c'est un souvenir précis de mon passé d'écolier: les livres scolaires, en début d'année on les couvrait systématiquement de papier d'emballage (il ne fallait pas les abîmer, car à la rentrée suivante il serviraient à quelqu'un d'autre); mais au fait, est-ce qu'au vingt-et unième siècle on fait encore ça? quand on rêve, en quelle année est-on?); signe des temps cependant, l'un d'eux s'est ouvert à une page couverte de chiffres et de graphiques, de tableaux où des lignes blanches ressortent sur fond bleu: une matière que je ne parviens même pas à identifier, ça pourrait être aussi bien de l'économétrie que de la physique quantique, les programmes ont dû bien changer depuis mon temps. Je finis par me décider à en ramasser un, et, bonne surprise: celui-ci, on dirait un recueil de contes, illustré de nombreuses gravures dont le style me plaît bien; je décide de le garder. C'est sans doute une bonne idée, car, à notre arrivée (le voyage ne m'a pas semblé long: peut-être ai-je dormi dans le train?) le temps est plutôt gris, peu propice aux longues promenades que nous avions imaginées. Où sommes-nous? Un hôtel? Un bed and breakfast? Une location? Je ne sais pas, c'est mon père qui a pris les arrangements pour le séjour: et puis, quelle importance, en rêve? Le bâtiment est ancien, sans doute plus qu'il n'en a l'air car il porte les traces de nombreuses rénovations: murs de pierre de taille, mais revêtements de sol plastifiés; immenses cheminées dans toutes les pièces, même dans la chambre, pourtant petite, qui m'a été attribuée, mais mobilier disparate et bon marché, matelas en mousse sur le sommier sans châlit qui prend presque toute la place. Des gouttes d'eau s'écrasent sur les vitres. Je m'assois sur le lit et j'examine mon livre. Il y a même des pages dépliantes, des cartes sans doute? Ah non, ce sont aussi des illustrations, des scènes qui grouillent de personnages, encadrées de frises d'animaux fantastiques... tout à fait le genre de livre que j'aurais pu choisir dans une librairie (ou plutôt chez un bouquiniste, car, ça se voit, il n'est pas tout jeune); il y a parfois de ces coïncidences, dans les rêves! Quand je lève les yeux, je vois que la pluie tombe à présent drue et verticale. Et il ne fait vraiment pas chaud. Tant pis, je dormirai avec un pull, comme à la maison.
vendredi 12 mai 2023
Une nuit froide (pour la saison)
Jamais je ne l'ai rencontré, en rêve, le prince de Tchou.
Quant au phénix... peut-être une fois, et encore, je ne suis pas sûr.
Et si nous redescendons de ces hauteurs spirituelles, en quête de rencontres oniriques moins prestigieuses mais tout de même encore un peu mémorables, cela fait longtemps que je n'ai pas escaladé de dinosaure, commandé de navire pirate ou simplement affronté des samouraïs géants (vous savez, comme dans Brazil ou Sucker Punch; je suis pourtant sûr que je m'en sortirais très bien).
À quoi l'attribuer? Fatigue? Burn-out? Retour de mes problèmes chroniques d'apnée du sommeil? Mes rêves récents sont désespérément prosaïques. Cela m'inquiète un peu, ça ne me ressemble pas. Dernièrement, je suis réveillé par un bruit insolite: comme un ronflement de flammes. Je m'en souviens parfaitement, avant de me coucher j'ai allumé le poêle électrique dans le couloir: la saison que nous traversons est si froide, je pensais que ce serait agréable de trouver au matin l'appartement un peu réchauffé. Mais, je me le demande à présent, le poêle n'était-il pas un peu trop près du gros tas de vêtements empilés juste à côté? Et si quelque chose avait pris feu? Je me secoue, me dégage des draps sans ouvrir les yeux, et voilà que je heurte le bol de salade de fruits que j'ai laissé entamé près de mon lit: heureusement le tintement de la cuillère m'alerte: ouf! Je ne l'ai pas renversé. Vite, allons vérifier que le poêle... ce n'est qu'à ce moment que je me souviens qu'il n'y a pas de poêle électrique, qu'il n'y en a jamais eu.
Et, soyez complètement rassurés: il n'y avait pas de bol de salade de fruits non plus.
mercredi 10 mai 2023
Haiku macaronique
Se pencher sur le reflet de la lune dans l'eau, lever les yeux vers les branches fleuries des cerisiers, tendre l'oreille vers la rumeur des couloirs de la prison... est-ce vraiment nécessaire pour imaginer des haikus approximatifs?
Ne soyons pas timides: pour se convaincre qu'on a composé un haïku, au lieu de compter et recompter les pieds, il suffit de se dire que, si c'était traduit en japonais, ça ne sonnerait sans doute pas mal.
En écrivant sur le mur avec une branche de pin,
Le vent s'aperçoit qu'il a fait une faute.
Pas content, il casse son pinceau.
Et si, vous aussi, passantes, passants, vous vous lanciez dans la composition de haïkus, en jetant toutes les règles de versification par-dessus bord (ça laisse du temps pour faire autre chose)?
Photo: Arnaud Maisetti