mercredi 3 juillet 2013

Rêve du changement de saison



Les rêveurs de l'Antiquité voyaient dans leurs songes danser des faunes et des dryades, ceux du Moyen-Âge des anges sonner de la trompette; les rêves on toujours suivi la mode, et il n'y a donc pas de cause sérieuse à l'embarras que peut ressentir un rêveur du vingt-et-unième siècle à avouer que dans bon nombre de ses rêves il se retrouve devant un écran d'une sorte ou d'une autre, à visionner un film, à suivre un feuilleton ou un bulletin d'actualités, à surfer sur le web ou à élaborer une présentation, et pourtant…
... quand ça nous arrive nous ne pouvons nous défendre d'un sentiment d'inadéquation: est-ce normal que la technologie ait à ce point envahi notre jardin secret? où sont passés les rêves décrits dans les clés des songes? 
Il paraît que si l'on rêve d'un chien, on va recevoir une lettre; si on rêve d'un coq, c'est de l'argent qu'on va recevoir. Pas étonnant que nous soyons tous fauchés: si loin que ma mémoire remonte, je ne me souviens pas que quelqu'un m'ait jamais confié avoir rêvé d'un coq. 
Sérieusement, vous en faites souvent, vous, de ces fameux rêves où l'on perd ses dents, où l'on tombe sans fin, où l'on s'envole? Non, moi non plus: c'est de plus en plus souvent qu'il m'arrive de rêver que je suis devant un film, et que dans le rêve, je sais que c'est un film… et non seulement cela, mais j'en reconnais les codes, et à l'intérieur du rêve, j'adopte une position de critique.  

Il ne faisait pas de doute pour moi, dans ce rêve, que j'étais en train de regarder un feuilleton télévisé: plus précisément le premier épisode de la troisième saison d'une série qui avait déjà conquis son public par un solide sens du suspense. Les personnages principaux (un clone de Bruce Willis et une robuste rouquine) étaient associés dans une agence de détectives privés, et avaient passé les deux saisons précédentes à alterner résolutions d'affaires compliquées et marivaudage. Quelque chose clochait dès le début du nouvel épisode: cadrage serré, fréquents mouvements de caméra, les artifices habituels pour cacher quelque chose au spectateur…  de plus - là encore, on sentait venir une embrouille - ce n'est pas avec son partenaire habituel que la rousse poursuivait une conversation animée, mais avec un individu patibulaire, crâne rasé et dégaine de Marine; je me souvenais vaguement qu'il faisait quelques apparitions dans la saison précédente, mais de quel côté de la barrière était-il, déjà? Flic ou truand? Il n'inspirait pas vraiment la sympathie… Leurs échanges laissaient entendre que c'était l'ex de la belle détective, et, qui l'aurait cru? qu'ils avaient un enfant déjà grand; c'est à cet enfant qu'ils allaient rendre visite. 
Rendre visite? et là le cadre s'élargissait, on découvrait enfin qu'une vitre séparait  nos deux héros de l'adolescent: c'est dans le parloir d'un centre de détention qu'ils étaient venus le retrouver… chapeau, le scénariste, voilà un twist qu'on n'a pas vu venir, ai-je eu le temps de penser avant de me réveiller. 

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