vendredi 12 décembre 2014

La quantité de signes distincts sur le papier (3): la conclusion finale


L’application de l’intelligence créatrice
à un problème,
la découverte d’une solution à la fois solide,
élégante et fulgurante,
voilà ce qui lui avait toujours paru être l’affaire centrale des êtres humains - la mise à jour du sens
et de la causalité au milieu des
fausses pistes, du tumulte et des friches de la vie.
Pourtant il avait toujours été hanté - non? - par la conscience qu’il existait des hommes,
des cryptographes insensés,
des détectives fous qui gaspillaient leurs dons et leur santé mentale
à décoder et à interpréter les messages
prétenduments écrits dans les formations nuageuses,
les recombinaisons de lettres de la Bible,
les taches des ailes des papillons.

De l’existence de tels hommes,
on pouvait peut-être conclure
que la signification résidait uniquement
dans l’esprit de l’analyste.

Que c’était les problèmes insolubles
- les fausses pistes et les dossiers froids -
qui reflétaient la véritable nature des choses.

Que toutes les sémantiques et structures apparentes
n’avaient pas plus de sens intrinsèque que
le jacassement d’un perroquet gris d’Afrique.
On pourrait en tirer cette conclusion;
vraiment,
songeait-il,
on le pourrait.

Michael Chabon, La Solution Finale
( The Final Solution2004)
traduit par Isabelle D. Philippe, 
Robert Laffont, 2007

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