mercredi 15 mars 2023

Meubler un rêve de meubles dépareillés (Sebastian Knight, 6)

 Il me semble que l'an dernier nous n'avons pas pris congé dans les formes de Sebastian Knight et de son biographe. Il est grand temps de réparer cette erreur (avant de nous pencher sur un autre livre de Nabokov, un jour prochain, peut-être?).

Et cette nuit-là je fis un rêve singulièrement pénible. Je rêvai que j'étais assis dans une vaste salle sombre que mon rêve avait hâtivement meublé de quelques meubles dépareillés, pris dans différentes maisons que je connaissais vaguement, mais avec des vides ou de bizarres substitutions, comme par exemple ce rayon d'étagère qui était en même temps une route poussiéreuse. J'avais le sentiment confus que cette salle se trouvait dans une ferme ou une auberge de campagne - une impression générale de boiseries et de planchers. Nous étions en train d'attendre Sebastian - il devait revenir de quelque long voyage.

Dans les derniers chapitres de son livre, le jeune V reproduit - probablement sans s'en rendre compte, n'est-ce pas? Il ne possède pas, des procédés littéraires, une maîtrise aussi parfaite que son demi-frère - le procédé utilisé par l'auteur de Succès: reconstituer minutieusement l'enchaînement de contretemps qui l'empêcheront de rencontrer Sebastian une dernière fois.
C'est ainsi que la dernière fois que V aura parlé à Sebastian, ç'aura été en rêve.

 

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