Vous l'avez compris à la lecture du billet précédent, c'est avec des sentiments mêlés que j'ai pris congé de l'année dernière.
2012 avait tout pour être une année mémorable - ou était-ce mémorielle? mes idées sur la question sont un peu confuses à présent. C'était l'année où Edward Lear aurait eu deux cents ans, où Alan Turing en aurait eu cent…
Bien sûr, nous savions bien, en accueillant 2012, qu'il ne nous serait pas donné d'y scander He's a jolly good fellow pour réjouir Edward Lear, de crooner Voulez-vous danser, grand-père? pour émouvoir Alan Turing: nous allions nous contenter, pour fêter ces anniversaires, d'échanger entre nous des vers de mirliton, des dessins défiant le sens commun et des devinettes mathématiques, et nous avions pris notre parti de l'absence des héros de la fête…
Mais nous ne nous attendions pas à ce que, dans la même année, juste après Ronald Searle, disparaissent Dorothéa Tanning, Moebius, Maurice Sendak, Ray Bradbury, Antonio Tabucchi, Harry Harrison, Chris Marker et Gore Vidal, Spain "Trashman" Rodriguez et Boris Strougatski, Roland C. Wagner et Nakazawa Keiji…
Après avoir dit au revoir à 2012, j'ai hésité quelque temps à partir à la rencontre de 2013 pour la saluer. C'était assez tentant, de passer à côté de la nouvelle année en faisant mine de ne pas la voir et en espérant qu'elle serait elle-même trop occupée pour rien remarquer.
Ça a été reposant, de vivre sans le temps, avec juste l'espace, pendant quelques kilomètres (oui, parce que quand il n'y a pas de temps, on compte en kilomètres), à ne rien faire parce que plus rien ne pressait.
Et puis…
... vous savez ce que c'est,
quand la pendule n'est pas là pour nous dire qu'il est temps de cesser de ruminer (on rumine beaucoup dans l'espace), inévitablement on se retrouve avec, coincées dans les dents, des pensées désagréables:
et si, à rester trop longtemps en-dehors du temps, on se retrouvait, comme l'astronaute dans 2001, à dériver si loin de la grosse machine qu'on n'arriverait plus à la rattraper?
Ce rare document d'époque témoigne des premiers pas dans le monde de l'année 1913. C'est mignon à cet âge-là, faudrait pas que ça grandisse. |
Bonjour donc, 2013. Ce serait plutôt sympa de laisser cet endroit dans l'état où tu l'as trouvé en arrivant; même, si tu ne sais pas quoi faire de tes minutes, il ne t'est pas interdit de penser à apporter quelques petites améliorations.
Tiens, j'ai une idée: ce serait cool si tu pouvais faire en sorte que Siné soit en pleine forme pour fêter avec nous la prochaine Saint-Sylvestre, et si pour permettre ça il faut rétablir un quelconque équilibre cosmique (on peut supposer que tu as sans doute, comme ta collègue 2012, un quota de trous à remplir), tu pourrais lui donner l'occasion de suivre l'enterrement de quelques-uns (tous, ce serait sans doute trop demander?) des petits malins qui, naguère, l'ont enterré, lui, un peu prématurément.
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