Il vient à l’homme qui chevauche longtemps au travers de terrains sauvages, le désir d’une ville.
Pour finir, il arrive à Isidora, une ville où les palais ont des escaliers en colimaçon incrustés de coquillages marins, où l’on fabrique lunettes et violons dans les règles de l’art, où lorsque l’étranger hésite entre deux femmes il en rencontre toujours une troisième, où les combats de coqs dégénèrent en rixes sanglantes mettant aux prises les parieurs. C’est à tout cela qu’il pensait quand il avait le désir d’une ville. Isidora est donc la ville de ses rêves:
à une différence près.
Dans son rêve, la ville le comprenait lui-même, jeune; il parvient à Isidora à un âge avancé. Il y a sur la place le petit mur des vieux qui regardent passer la jeunesse; lui-même y est assis, parmi les autres.
Les désirs sont déjà des souvenirs.
Italo Calvino, Le città invisibili, 1972,
Les villes invisibles, traduit de l'italien
par Jean Thibaudeau, Le Seuil, 1974.
Nouvelle traduction par Martin Rueff
Collection Folio (no5460) 2013-2020
6 commentaires:
C’est très beau et je n’ai toujours pas lu Calvino. Parait qu’une partie de son œuvre vient d’être publié en Pleiade.
L'édition que j'ai citée n'est plus disponible en neuf (Calvino a carrément disparu du catalogue du Seuil); mais presque tous les titres sont maintenant disponibles en poche (souvent sous des couvertures hideuses). La Pléiade, je commence à me méfier un peu, surtout de leurs choix de "traductions nouvelles".
J’ai un seul Pleiade (Borges) et letragel/ligatures/papier me donne pas vraiment envie de le ressortir. Comme j’achète beaucoup d’occase, je vais voir de ce côté.
letragel/ligatures/papier? j'avoue, je n'ai pas compris. C'est une abréviation?
oups, c’était plutôt "choix de la police de caractère" avec sa ligature qui perturbe ma lecture.
Merci! Maintenant je comprends mieux.
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