J’apprends ainsi qu’un des plus grands succès actuels du box-office est une comédie de mœurs contemporaines, située dans un pays évidemment imaginaire qui ressemble beaucoup à la France, ou à la Belgique, ou au Groland; l’autorité suprême y est partagée entre un président, qui pourrait assez facilement passer pour une caricature de Sarkozy, et un premier ministre qui ressemble curieusement à Hollande. Étrange répartition des rôles, n’est-ce pas? La critique est d’ailleurs unanime à louer la composition de l’acteur qui incarne le premier ministre Hedwige (c’est comme ça qu’il s’appelle dans le film); ce rôle comique serait une première dans une carrière où il ne s’était fait remarquer, jusque là, que dans des films d’action (d’après les photos qui le montrent au naturel, sans son rembourrage et ses lunettes de ministre il ressemble un peu à Jean Dujardin).
Le pitch en quelques mots: le premier ministre, qui ne s’entend pas très bien avec le président, prépare discrètement sa sortie, car il vient de gagner le gros lot à Euromillions, et il entend bien le dépenser tranquillement dans l’anonymat retrouvé d’une retraite confortable; il cherche prétexte sur prétexte pour présenter une démission qui doit donner l’impression d’être imposée par la conjoncture politique, et, autant que possible, laisser au public le souvenir d’un geste d’une noble abnégation, dicté par la raison d’État; mais les choses ne vont pas se passer (dans le film) exactement comme il l’a prévu.
Ne me demandez pas comment s’appelle ce film, ni qui l’a réalisé, ni les autres détails de l’affiche: au réveil, je ne m’en souvenais plus, il ne me restait que ce nom de Monsieur Hedwige et l’impression que ce scénario, après tout, ne serait pas plus idiot qu’un autre (quoi, les hommes politiques ne joueraient pas à Euromillions? Mais justement, répondrait un scénariste si on en discutait avec lui, les circonstances qui feraient entrer Hedwige en possession du billet gagnant, on pourrait, en accentuant leur aspect improbable, les traiter comme de désopilantes péripéties). Je me suis souvent demandé où ils allaient chercher leurs idées, les scénaristes, les auteurs de feuilletons, tous ces gens qui ont suffisamment d'idées pour en revendre? Je n’y avais pas pensé: c’est peut-être dans leurs rêves.