dimanche 16 juillet 2017

Une non-suite et une fin



La dernière fille et le dernier garçon sur terre se préparent à attendre ensemble la fin de toutes choses. Ils ont de la chance: ils ont été les meilleurs amis du monde aussi longtemps qu'il y a eu un monde et maintenant qu'il n'y en a plus, ils restent, simplement, les meilleurs amis qu'il y ait nulle part, c'est déjà ça et ils auraient pu plus mal tomber.

Je suis en train de lire ça dans un livre pas encore écrit (un des privilèges qu'on a dans les rêves). 
Quel livre? Je n'en suis pas sûr. Peut-être s'agit-il de la fameuse "non-suite" que Philip Pullman a promis de donner bientôt à sa fameuse trilogie His Dark Materials, en français À la croisée des mondesJ'ai lu ça quelque part: il en parle tantôt comme d'une "companion trilogy", tantôt comme d'une  "equel", voulant dire par là que cette histoire ne se situe ni après sa première trilogie, comme une sequel, ni avant, comme une prequel. Philip Pullman aime bien inventer des mots.
En tous cas la fille du rêve, la dernière fille de l'univers, ressemble à la Lyra Belacqua du film (Dakota Blue Richards) - autre privilège de rêve: je vois tout ce que le livre décrit aussi clairement que si j'y étais.
Je peux bien vous avouer que je n'ai été totalement conquis ni par la pondéreuse trilogie romanesque de Pullman - un ouvrage que je n'ai certes pas détesté, mais que j'aurais aimé pouvoir aimer davantage - ni, pour des  raisons différentes, par sa réticente, incomplète et pourtant encore pesante adaptation cinématographique, et que le meilleur souvenir que j'en garde, c'est la frimousse de Dakota Blue Richards (et à vrai dire, cette ressemblance est la seule chose qui m'incite, au réveil, a supposer un lien entre ce rêve et l'univers de Philip Pullman*)
La veille au soir, justement, j'avais décidé de donner au film une seconde chance et (je n'avais rien trouvé de mieux à faire et il faut bien passer le temps) je l'avais glissé dans le tourne-disque avant de m'endormir.

La dernière fille et le dernier garçon se retrouvent donc ensemble à la fin de tout, il n'y a déjà plus grand' chose autour d'eux, et ce plus grand' chose s'écoule comme du sable. Tandis que le garçon peine à garder un visage, la fille, elle, persiste, sans effort apparent, à ressembler à Dakota Blue Richards.

Le garçon a besoin de réconfort.

- Raconte ce qui nous arrive, supplie-t-il.
Comme si c'était arrivé il y a longtemps.
Raconte, tu racontes si bien.
Alors elle raconte le peu qu'il reste à raconter.
- Nous sommes au centre de tout ce qui reste, et ce tout qui reste devient nous.
Je deviens toi, tu deviens moi, nous devenons nous.
Aussi longtemps qu'il reste quelque chose, ce  quelque chose est nous.
Je vois par tes oreilles, tu entends par mes yeux.
Tu es ma parole, je suis ta voix.
Tu es mes cheveux, 
je suis tes dents. 
Tu es ma main, 
je suis ta main.

Elle parle ainsi pour deux jusqu'à la fin.
Le peu qui reste à présent de ce qui fut tout ressemble à une poignée de sable.

Et c'est comme ça, juste quand je lis ces dernières lignes, que le rêve finit.




À l'aube, la moitié du ciel est restée grise. Il avait plu de la cendre. L'air sentait la fumée. Toute la nuit, des pinèdes avaient brûlé à quelques dizaines de kilomètres au nord. Le monde continuait.

* À moins que... à la réflexion, il y a peut-être quelque chose de pullmanien dans cette idée, que tout se résout en poussière, en sable?

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